Plan hydrogène : « Une étape majeure est franchie »

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TRIBUNE. Fabio Ferrari, représentant des entreprises du secteur, salue, dans une tribune au « Monde », le plan de soutien gouvernemental à l’énergie hydrogène.

 

Tribune. Tel Sisyphe atteignant un plateau… Alors que le gouvernement de Jean Castex vient d’annoncer un « plan hydrogène », qui devrait être doté d’un budget comparable à celui dégagé par l’Allemagne, des dizaines de chefs d’entreprise et de chercheurs français éprouvent certainement un sentiment comparable à celui du fondateur [mythique] de Corinthe. Eux qui, depuis des années, ont poussé le rocher de l’hydrogène vers le destin qu’il mérite et qui, bien souvent, ont cru qu’ils n’y arriveraient jamais. Les citer serait en oublier. Ils se reconnaîtront.

L’effort déployé a en effet été immense, et cela se comprend : ne s’agit-il pas de faire bouger ce monstre si confortablement installé que l’on appelle le « système énergétique » ? Lui qui depuis des années s’appuie sur les énergies fossiles (pétrole, gaz) pour nourrir les bâtiments, les transports et l’industrie – et encore à près de 80 % aujourd’hui en Europe. En matière de mobilité en particulier, ne s’agit-il pas de remplacer une bonne partie des motorisations diesel et essence, certes polluantes et émettrices de gaz à effet de serre mais si faciles à vivre pour les usagers ?

Cela avec des obstacles de taille : les technologies d’abord, qu’il a fallu développer et standardiser afin qu’elles soient parfaitement sûres et industrialisables (piles à hydrogène, électrolyseurs…).

 

Quelques personnes dans un garage

 

Symbio, McPhy, Atawey – et j’en oublie –, toutes ces entreprises n’étaient que quelques personnes dans un garage il y a quelques années, avec entre les mains une technologie hydrogène dans laquelle elles croyaient dur comme fer. Aujourd’hui beaucoup se mettent en ordre de marche pour industrialiser à « vitesse grand V » et se lancer à l’international…

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Les modèles économiques ensuite, qu’il a fallu inventer pour que les fabricants de stations hydrogène et de véhicules aient intérêt à investir en même temps dans des projets de déploiement – condition pour qu’ils ne s’attendent pas l’un l’autre indéfiniment. Et à ce niveau, l’Europe a été d’une aide précieuse, en soutenant des écosystèmes modèles comme Zero Emission Valley en Auvergne-Rhône-Alpes (1 000 véhicules et 20 stations).

Dernier obstacle de taille : la croyance selon laquelle « la batterie allait tout faire » et que l’hydrogène était de ce fait inutile. Aujourd’hui il est enfin admis que ce dernier, complémentaire à la batterie, est incontournable si l’on souhaite que les véhicules, professionnels notamment – utilitaires, bus et camions urbains à court terme, puis gros camions à moyen terme –, se convertissent au zéro émission. Seul l’hydrogène leur permet en effet de faire le plein en quelques minutes et de transporter du « lourd ».

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Quelle belle récompense donc que ce plan français, pour tous ceux qui se battent depuis des années.

 

Course au leadership

 

D’autant qu’après la « mise en bouche » du plan de 2018 (près de 100 millions d’euros sur deux ans), celui annoncé aujourd’hui – qui sera détaillé le 8 septembre – reconnaît l’enjeu de compétitivité mondiale, d’industrialisation et d’emplois qui se cache derrière la montée en puissance rapide de la filière hydrogène française – elle qui rassemble des entreprises de toutes tailles présentes sur l’ensemble de la chaîne de valeur : de la production d’hydrogène (Air Liquide, EDF, Engie…) à celle de stations (McPhy, Atawey), d’équipements pour les véhicules (Symbio, Plastic Omnium, Faurecia…), aux constructeurs (Renault, PSA, Safra…) et aux opérateurs (Michelin).

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Indispensable. Car la course au leadership est déjà engagée au niveau mondial ; la Chine, la Corée du Sud et le Japon ont déjà pris une longueur d’avance. Accélérer la montée en capacité de cette filière est donc la clé si l’on ne souhaite pas renouveler les erreurs commises sur les batteries et les panneaux solaires notamment – importés d’Asie – mais plutôt créer de la valeur et des emplois locaux. Le souci de l’Europe et de la France de créer un « Airbus de l’hydrogène » va dans le bon sens.

Les pionniers peuvent donc respirer. Une étape majeure est franchie. Certes, un plateau n’est pas un sommet et la pente à suivre s’annonce raide. Mais les Sisyphe de l’hydrogène français ont pu y faire le plein d’énergie (en trois minutes !) et leur équipe grandit. Cette fois le rocher ne retombera pas. C’est parti.

Fabio Ferrari est cofondateur et directeur général de Symbio, un des pionniers de l’hydrogène pour véhicules utilitaires en France.

Source: © Plan hydrogène : « Une étape majeure est franchie »

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