Biennale de Paris en ligne : rien ne remplacera jamais les galeries, les foires et les expositions d'art

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DÉCRYPTAGE – En l’absence de la manifestation, annulée pour raison sanitaire, les marchands s’étaient associés à Christie’s pour créer l’événement en ligne. Mais avec moins d’un lot sur quatre vendu, le résultat est très loin d’être probant.

Jusqu’au 8 octobre, Christie’s offrait sur sa plateforme en ligne, les tableaux et objets de 42 galeries qui auraient dû participer à la Biennale Paris. L’événement avait été annulé début septembre au Grand Palais pour cause de Covid-19 et reporté en 2021 sous la structure éphémère du Champs de Mars. À la clôture des enchères, même si l’on s’attend à encore quelques «aftersales», le résultat n’est cependant pas très probant. On compte 21 lots vendus seulement sur 90, pour un maigre produit de 1,5 million d’euros. Prudemment, Christie’s n’avait pas annoncé d’estimation globale, pour ne prendre aucun risque.

C’est très peu alors que les ventes en ligne n’ont jamais aussi bien marché en ces temps de pandémie, enregistrant des résultats records dans presque tous les domaines. Initiée par le président de la Biennale Paris, Georges de Jonckheere qui cherchait un autre moyen de faire parler de la Biennale, cette opération n’a pas incité non plus les amateurs à aller voir les pièces dans les galeries, ouvertes pendant toute la durée de la vente en ligne. Celles exposées chez Christie’s, notamment par les marchands étrangers qui n’avaient pas d’espace à Paris, ont eu plus de visibilité. Ce qui fait dire au petit milieu du marché de l’art que «les marchands se sont brûlé les doigts alors que, pendant des années, ils se sont plaints des maisons de ventes qui ont grignoté leur champ d’action".

Vierge à l'enfant avec un perroquet de Jonckheere, vendue pour 150.000 euros (avec les frais), qui sera présentée dans les collections du musée Granet d'Aix en Provence.
Vierge à l’enfant avec un perroquet de Jonckheere, vendue pour 150.000 euros (avec les frais), qui sera présentée dans les collections du musée Granet d’Aix en Provence. Christie's

Il y a donc de quoi s’interroger sur cette alliance inédite entre marchands et maisons de ventes, concurrents si redoutés pour leur force de frappe marketing, leur réseau de clients et leur puissance du digital. Visiblement l’association entre ennemis de si longue date n’a pas fonctionné. Et la marque Christie’s n’a pas réussi à faire vendre même si celle-ci a mis les moyens pour créer une plateforme digitale ayant généré 4000 connexions par jour en moyenne depuis 32 pays. Et un e-catalogue largement diffusé auprès de ses clients à travers le monde, en mettant en avant les spécificités de chaque marchand et leurs lots phares à des estimations attractives. Si bien que certains, disent-ils, « ont refusé de participer à la vente car Christie’s ne leur en proposait pas assez cher ".

Des résultats encourageants selon les organisateurs

"Je suis particulièrement heureuse de voir que des dizaines de milliers de personnes se sont connectées afin de découvrir des chefs-d’œuvre présentés par les plus grandes galeries internationales,», estime toutefois Cécile Verdier, présidente de Christie’s France. Nous avons été heureux de pouvoir offrir à la demande de la Biennale et du Syndicat national des antiquaires, une plateforme interactive inédite entière créée pour ce projet ambitieux avec toutes nos équipes.» Plus nuancé, Guillaume Cerutti, CEO de Christie’s estime qu’il «faut juger des résultats de cette initiative au-delà de la dimension purement financière…»«Les réactions positives de nos clients et des observateurs du marché nous incitent à poursuivre dans cette voie», ajoute-t-il.

Mais qui sont ces fameux observateurs du marché ? Les marchands qui n’ont pas vendu ne sont évidemment pas contents. Nombre de collectionneurs n’ont pas adhéré à l’idée même si l’on compte quelques belles ventes : 150.000 euros pour la Vierge à l’enfant avec un perroquet (début XVIe siècle) qui rejoint les collections du Musée Granet d’Aix-en-Provence (Galerie De Jonckheere), 137.500 euros pour un Candélabre de Claude Lalanne (Galerie Mitterrand), 62.500 euros pour le Banc-taureau en bronze de Jean-Marie Fiori (galerie Dumonteil).

"Pourquoi aller payer des frais de près de 30% sur un objet en ventes publiques, alors que l’on peut le négocier en direct, et souvent moins cher, chez le galeriste», observe un amateur qui est allé surfer sur le catalogue en ligne mais s’est bien gardé d’acheter quoi que ce soit. Il y a fort à penser que ce même amateur ira frapper à la porte de la galerie pour acquérir l’objet de son choix en discutant le prix car, une fois passé dans le catalogue Christie’s, celui-ci est grillé et donc difficile à revendre.

Chacun à sa place

La conclusion est qu’il ne faut pas mélanger les genres. Le monde des ventes publiques a besoin des marchands et inversement, mais chacun doit rester à sa place. Rien ne remplacera jamais les expositions en galerie comme l’a montré jeudi 8 octobre, l’événement «le Rendez-vous» lancé par Christian Deydier, ancien président du Syndicat des antiquaires et de la Biennale, qui a vendu tout de suite quelques pièces historiques d’une collection inédite d’art chinois. Plusieurs autres sont déjà convoitées par de grands musées internationaux. Il y avait un air de fête au quartier Saint-Germain où plus de 70 marchands ont réussi à faire venir leurs clients dans leurs espaces, avec une coupe de champagne à la main.

Rien ne remplacera jamais non plus les foires et les salons ,dont les éditions en ligne, assez fastidieuses à consulter, ne marchent pas aussi bien qu’espéré. C’est la raison pour laquelle, la Tefaf Maastricht, vient d’annoncer, à l’inverse de la Brafa de Bruxelles qui a jeté l’éponge en janvier, qu’elle n’annulerait pas son édition de 2021. Prévue en mars, celle-ci se tiendra du 31 mai au 6 juin, même si elle maintient une édition en ligne du 1er au 4 novembre…

"Reporter les dates de la Tefaf, au printemps, quand il fera plus chaud, nous donne une chance de faire ce salon en physique. C’est le souhait de tous nos exposants que nous avons consulté un à un, après délibération également avec les autorités des Pays-Bas. La majorité a confirmé sa participation pour la fin mai», explique Hidde van Seggelen, président du comité exécutif de la foire néerlandaise. Mais tout peut encore changer d’ici là avec l’évolution de la pandémie dont la Tefaf fut la première à partir l’an dernier, en fermant plus tôt ses portes, après la découverte de cas de Covid-19 chez certains de ses exposants. Un cluster dont personne n’avait osé parler et qui avait rendu furieux certains marchands ayant affirmé ne plus vouloir revenir l’année suivante…

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