Photo, peinture, art brut, dessin… nous avons sélectionné dix ouvrages de qualité, où les arts visuels se découvrent élégamment, en attendant la réouverture des musées.
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« Que voyez-vous, Monsieur ? »
Pierre Parsus est fasciné par le retable qu’il analyse dans ce livre, depuis l’été 1973 et son exposition à l’hospice de Villeneuve-lès-Avignon. PIERRE PARSUS, 2020
Sur un air à la fois sérieux et ludique, ce livre propose une analyse minutieuse du retable intitulé Le Couronnement de la Vierge, réalisé par Enguerrand Quarton (peintre et enlumineur français du Moyen Age tardif, dont quelques toiles figurent parmi les premiers chefs-d’œuvre du XVᵉ siècle et contrastent avec la peinture italienne ou flamande). Sérieux car l’analyse détaillée de ce tableau fascine Pierre Parsus (né le 6 juin 1921 à Paris) depuis l’été 1973 et son exposition à l’hospice de Villeneuve-lès-Avignon et il n’a de cesse d’en déchiffrer le contenu ésotérique et d’interroger la part de mysticisme qui en émane. Ludique car le lecteur parcourt le livre à la recherche d’une énigme : transcender l’apparence pour atteindre la lumière, la connaissance, le savoir, cette quête ultime qui donne sens à ce qui serait resté enfoui, caché, invisible. C’est en 2016 que Pierre Parsus réalisera 50 planches figurant ses découvertes ésotériques sur le retable : la partie picturale est enrichie de 44 reproductions en couleurs d’œuvres du peintre (esquisses, études, grandes toiles abouties, toutes inspirées par la symbolique flamboyante de cette œuvre). Et l’artiste de conclure : « L’éclair de lumière tel un trait qui foudroie, m’a arraché un eurêka ! Comme nous étions à table, Lucette a sursauté, je m’en suis excusé : “N’aie crainte… c’est merveilleux !” »
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« Cindy Sherman », catalogue d’exposition
Cindy Sherman est son propre et unique sujet, dans des mises en scène souvent étranges. EDITIONS LOUIS VUITTON, 2020
Témoin visuel de l’exposition qui a eu lieu cet hiver à la Fondation Louis Vuitton, à Paris, ce catalogue rassemble en un seul volume l’œuvre au long cours de la photographe Cindy Sherman (née le 19 janvier 1954 à Glen Ridge, dans le New Jersey, aux Etats-Unis). Unique sujet de son œuvre, elle n’a cessé de nouer des dialogues – depuis la fin des années 1970 – avec l’univers de la mode, du cinéma et des magazines. A travers 170 clichés qu’elle décline en séries successives, soit près de cinquante ans de carrière, ce livre montre des identités troubles et multiples, des histoires inventées, une réalité souvent cruelle – comme celle qui rend visible le passage du temps, de ses marques à ses empreintes. Sans oublier le recours au maquillage, au déguisement et aux retouches, qui mène Cindy Sherman à « scénariser » et à mettre en scène des images souvent étranges.
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« Raphaël par le détail »
L’ouvrage aborde certaines des œuvres du peintre italien sous l’angle du détail : une vision à la recherche de la perfection qui traque l’harmonie existant entre le corps et l’esprit. EDITIONS HAZAN, 2020
Considéré comme l’un des artistes les plus importants de la Renaissance italienne, Raphaël (1483-1520) est surtout connu pour ses madones harmonieuses et sereines – où les postures et les visages se déploient sans torsion, ni excès, loin des tourments de l’âme humaine – et ses travaux au Vatican (dont l’émouvante et troublante Madone Sixtine qu’il peint lorsqu’il décore la Chambre d’Héliodore entre 1512 et 1514). Cet ouvrage aborde certaines de ses œuvres sous l’angle du détail : une vision à la recherche de la perfection qui traque l’harmonie existant entre le corps et l’esprit, expliquée dans ce livre par l’association, simple et didactique, du texte et de l’image. L’ouvrage est organisé par thèmes et comprend une biographie et une liste des œuvres pour une meilleure approche de sa vie – avec une large place accordée à son enfance, aux artistes qui l’ont influencé (comme Le Pérugin, et les deux grands maîtres que furent Michel-Ange et Léonard de Vinci).
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« Victor Hugo. Dessins »

A partir des collections de la Maison de Victor Hugo à Paris, ce livre réunit des dessins étonnants et révèle, en écho à ses textes, une partie de l’œuvre graphique du poète et écrivain français (né le 26 février 1802 à Besançon et mort le 22 mai 1885 à Paris).
Selon un ordre chronologique, il témoigne d’un talent et d’une passion hors pair pour le dessin à la plume, cette autre forme d’écriture qui oscille entre ombre et lumière. Un bel ouvrage monographique qui replace les images dans le contexte de chaque période.
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« Les Arts décoratifs en Europe »

Ce cinquantième volume de la collection « L’art et les grandes civilisations » présente un panorama complet des arts décoratifs en Europe, trop longtemps considérés par les historiens comme un art « mineur ». Cette nouvelle synthèse en dresse un véritable état des lieux, depuis la Renaissance jusqu’à la seconde guerre mondiale : « Les autrices s’intéressent à la question de la circulation des modèles, des artistes et des artisans, aux matériaux et aux techniques, sans en délaisser aucun – arts du métal, du bois, du feu, du fil, du papier –, aux usages, à l’évolution des formes, à la variation du goût et au rôle des collectionneurs et des marchands. » Un livre unique aux œuvres multiples, rares et raffinées, mais qui toutefois demeure destiné à un public élitiste et exigeant.
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« Emotions. Sabine Weiss »

« Je pense qu’une photographie, pour être forte, doit nous raconter un aspect de la condition humaine, nous faire sentir l’émotion qu’a ressentie le photographe en face de son sujet », confie dans un entretien la photographe Sabine Weiss (née le 23 juillet 1924 à Saint-Gingolph, en Suisse). Alors qu’elle vient de recevoir le prix Women in Motion pour la photographie 2020, la photographe signe un livre qui propose une sélection de 200 clichés en noir et blanc dits « humanistes » (courant qui marqua surtout les années 1950 en France). Des portraits, des scènes de rue prises sur le vif mais pas seulement, car Sabine Weiss, c’est avant tout un état d’esprit : elle saisit au vol des images presque fugaces et volatiles pour les restituer avec une simplicité et humilité exemplaire, et les donner à voir au plus grand nombre.
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« Les contes de Perrault illustrés par l’art brut »

Trois contes en vers (dont Peau d’âne), huit contes en prose (La Belle au bois dormant, Le Chat botté, Cendrillon ou encore Le Petit Poucet), quatre-vingt-quatre artistes présentés dans des notices biographiques, cent trente œuvres d’art brut du XXe siècle à nos jours : contemporain de La Fontaine et de Molière, Charles Perrault (1628-1703) est connu pour avoir inventé le genre du conte – des récits issus de la tradition orale transmis sur plusieurs générations. Ce livre associe des artistes peu connus (et à découvrir, loin des conventions et des règles académiques imposées par une certaine lecture de l’histoire de l’art) à des textes qui décrivent les aléas des sentiments humains : la peur, l’angoisse, la colère et la fragilité, mais aussi la joie, l’insouciance, le partage et le soutien, et surtout cette quête du merveilleux, qui agit comme un antidote. Et si « l’imagination est un facteur commun qui instaure des liens forts et intimes entre ces deux arts », alors cet ouvrage a réussi son pari : montrer aux lecteurs que l’art populaire est aussi une quête vers la modernité, qui a su révéler au monde une forme d’art inédite et profondément novatrice.
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« De Delacroix aux surréalistes »

« Comment voir ce que nous lisons, traduire les abstractions qu’indiquent les mots en images concrètes ? Depuis les premiers manuscrits à peinture, les hommes s’y sont essayé. On a orné, décoré, illustré. Inversement : que nous dit un tableau, une gravure, une image ? Comment les traduire en mots ? […] Ce n’est pas le sujet traité qui fait la valeur de l’art », précise Jean-Yves Tadié, auteur de la préface.
Des livres illustrés, accompagnés d’estampes ou de compositions originales, des livres qui comportent des dédicaces d’écrivains à des peintres, à des éditeurs ou à des critiques d’art, sans oublier ceux entièrement conçus et réalisées par des artistes eux-mêmes. Cet ouvrage présente l’histoire des relations qui existent entre art et littérature, des années 1830 aux années 1930, en accordant également une place de choix aux romans et à la critique artistique : des échanges souvent intimistes, des correspondances parfois insolites et des découvertes précieuses – car rares – entre auteurs et artistes. Un ouvrage richement documenté, qui couvre un siècle de création.
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« Noir & blanc. Une esthétique de la photographie »
![« Au-delà d’une réputation d’élitisme et de passéisme, [la photographie en noir et blanc] incarne pour ses adeptes et défenseurs l’excellence graphique et plastique », peut-on lire dans l’avant-propos.](https://www.cjfai.com/wp-content/uploads/2020/09/LeMonde-22.jpg)
Apparue dans les années 1880, la photographie en noir et blanc exalte les contrastes, met en valeur les tonalités et les nuances, capte ou rejette la lumière, joue avec les contraires et place les images hors du temps. « Au-delà d’une réputation d’élitisme et de passéisme, elle incarne pour ses adeptes et défenseurs l’excellence graphique et plastique, l’imaginaire créatif, poétique et onirique, la subjectivité de l’auteur, la puissance émotionnelle, sensorielle, symbolique, une dimension mémorielle, intemporelle et universelle », précise l’avant-propos de l’ouvrage. Des œuvres emblématiques du fonds photographie de la BNF, qui proposent une autre lecture de l’histoire de l’image fixe, faisant des blancs, des noirs et des gris un véritable lexique visuel.
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« Les Amazones du Pop. She-Bam Pow Pop Wizz ! »

A l’image des bandes dessinées, les œuvres réunies dans ce livre mettent en lumière toute une génération d’artistes femmes, européennes comme nord-américaines, qui ont travaillé à embellir le quotidien pour édifier un monde meilleur. Des couleurs chatoyantes et vibrantes, des formes rondes et généreuses, une palette arc-en-ciel : autant d’éléments toniques qui contribuent à construire une nouvelle société, fondée sur le bien-être et la bonne humeur. A parcourir, à lire et à regarder sans modération.
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