Ce que Laurent Wauquiez prépare pour reconstruire les Républicains

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ENQUÊTE – Le nouveau président de LR dévoilera avant Noël les premiers noms de sa direction avant de rendre public l’ensemble de son équipe pour le conseil national, le 27 janvier. Objectif : «reconstruire la pensée de la droite».

«C’est ici que tout commence», annonçait Laurent Wauquiez pendant la campagne, convaincu que son heure comme leader de la droite serait enfin arrivée. Convaincu aussi que l’élection à la tête du parti ne constituerait qu’un point de départ. En rien un point d’arrivée. «Je suis très confiant. Moi, j’ai quatre ans pour reconstruire», ajoutait-il, se projetant déjà dans le temps long face à Emmanuel Macron. «On lui souhaite longue vie, mais il n’est pas exclu qu’on l’arrête avant!» C’est en tout cas ce à quoi aspire le nouveau patron des Républicains.

Étape par étape, très méthodiquement – brutalement, diront ses nombreux opposants -, Laurent Wauquiez veut désormais construire la suite. Persuadé qu’en cas d’échec du chef de l’État les Français réclameront «de la clarté» et attendront une réponse des partis politiques comme «clés de propositions». Avec lui, alors, au bon endroit. Wauquiez a tout organisé.

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Sans tarder, lundi matin à 9 h 30, le nouveau président rencontrera ainsi au siège du parti Bernard Accoyer, secrétaire général sur le départ. «Il faut qu’il ait le courage de renouveler les têtes et de tout changer, confiait peu avant l’élection Bernard Accoyer. Comme un chirurgien, il faut qu’il ait le courage de couper le pied tout de suite.» Avant les grands travaux, cette journée devrait être consacrée surtout à préparer son «20 heures» sur TF1, où il interviendra pour la première fois comme patron d’une partie de l’opposition.

Certains proches lui ont aussi conseillé de faire rapidement quelques gestes symboliques: un déjeuner avec une personnalité importante de la droite et du centre – le nom de Jean-Louis Borloo a été suggéré -, un témoignage pour les habitants de sa région, Auvergne-Rhône-Alpes, afin de souligner son enracinement local.

«Je veux tout de suite arriver à montrer une nouvelle génération, une nouvelle droite»

Laurent Wauquiez

Lui entend surtout déminer… «Cette semaine sera celle du renouvellement et du rassemblement», confie Laurent Wauquiez au Figaro. «Je veux tout de suite arriver à montrer une nouvelle génération, une nouvelle droite. Nous devons immédiatement ouvrir les portes et les fenêtres», poursuit-il, alors que de nombreux ténors, parmi lesquels Nicolas Sarkozy, avaient expliqué qu’une «une famille politique», ce n’est pas «une secte». «Le deuxième message consistera à rassembler, tendre la main, proposer à tout le monde de venir à bord pour arriver à remettre la droite ensemble.» Autant de défis à relever dans les prochains mois.

Wauquiez a aussi prévu de soigner les personnalités du parti occupant des fonctions importantes en souhaitant les rencontrer au plus vite. Comme le président du Sénat, Gérard Larcher, le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, son homologue à l’Assemblée, Christian Jacob, et, moins connu du grand public, le président de la délégation française du Parti populaire européen (PEE), Franck Proust. Wauquiez compte aussi appeler ses concurrents, Florence Portelli et Maël de Calan. Si la maire de Taverny a répété qu’elle ne voudrait aucun poste dans la nouvelle direction, le jeune juppéiste aimerait que ses soutiens soient représentés au bureau politique et à la commission nationale d’investiture, une instance stratégique dont la présidence devrait revenir à un wauquieziste.

Mardi, le nouveau patron de LR a noté dans son agenda la réunion de groupe des députés LR à l’Assemblée. Une phase institutionnelle qui se poursuivra – heureux hasard du calendrier pour Wauquiez – par une réunion du PPE, le 14 décembre à Bruxelles, avec notamment la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy. Une façon d’essayer de se poser comme le premier opposant à Emmanuel Macron avant le Conseil européen des 14 et 15 décembre.

Mais alors que la semaine sera riche en actualité avec notamment le sommet sur le climat, la remise du rapport sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, la conférence nationale des territoires, Wauquiez réfléchit à présenter la première partie de son équipe dirigeante, soit le 13 décembre, soit le 18 décembre. La deuxième partie devant être officialisée après les vacances de Noël pour que l’organigramme soit connu le 27 janvier, jour du conseil national des Républicains, à Paris.

«Guillaume Peltier fait partie des nouveaux visages que je mettrai en avant»

Laurent Wauquiez

Chose promise, chose due: Virginie Calmels sera nommée vice-présidente. Avec Guillaume Peltier comme possible deuxième vice-président. À la Fête de la violette, fin septembre, Wauquiez avait annoncé que son hôte, le député de Loir-et-Cher, jouerait «un rôle éminent» à ses côtés. «Guillaume Peltier fait partie des nouveaux visages que je mettrai en avant», ajoutait-il. Un engagement plusieurs fois confirmé par Wauquiez au fondateur des Populaires. Une manière pour le patron de LR de créer un binôme Calmels-Peltier, aux profils politiques différents: «les métropoles» et «les territoires», «la libérale» et «le populaire». Pour son futur secrétaire général, Laurent Wauquiez aimerait trouver un profil de «technicien», plutôt que de «politique». Et qui soit d’une loyauté absolue, de manière à bien tenir la boutique en son absence… «Sauf qu’avec sa conception du pouvoir, Wauquiez fera tout et les autres, le reste!», persifle un ténor LR.

Plusieurs noms sont cités pour les dix premières nominations. Ils correspondent aux élus remarqués ces dernières semaines par l’ex-candidat comme son porte-parole, le maire de Chalon-sur-Saône, Gilles Platret, le député LR de l’Ain Damien Abad ou le directeur de campagne, Geoffroy Didier. Même si le vice-président de la région Île-de-France irrite aussi certains wauquiezistes de la première heure. Le maire de Châteauroux, Gil Averous, a été jugé très bon en meeting, les jeunes députés Aurélien Pradié (Lot) et Fabien Di Filippo (Moselle), et Alexandre Vincendet, maire de Rillieux-la-Pape, ont aussi attiré l’attention.

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Les ténors de LR auront aussi droit à un traitement spécial, à l’instar de Valérie Pécresse ou de Xavier Bertrand, qui multiplient les critiques à l’égard de Laurent Wauquiez. «Valérie Pécresse est face à un choix. Au moment où Emmanuel Macron veut tuer la droite, participe-t-elle à l’entreprise de reconstruction ou joue-t-elle les chapelles de la division?», confiait Wauquiez au Figaro pendant la campagne, alors que certains sarkozystes le poussent à lui proposer la présidence du conseil national. «Je dis à Valérie, à Xavier et Christian (Estrosi) que je respecte leur sensibilité, leurs convictions, que leurs ambitions sont légitimes. Je connais leur talent et quand on a du talent, on le met au service de sa famille politique. Je leur dis aussi que l’heure est trop grave, que ce qui se joue dépasse nos destins personnels. Notre responsabilité est grande, il n’y a plus de place pour les parcours solitaires, c’est ensemble qu’il faut avancer», insistait le candidat pour son dernier meeting.

«Laurent est capable d’adapter sa ligne. Ce n’est pas un idéologue mais un opportuniste. On l’a vu sur l’Europe»

Un parlementaire LR

Par ailleurs, Wauquiez réfléchit toujours à constituer un «shadow cabinet» en collant au plus près à l’architecture gouvernementale. Bien que décrié par nombre de parlementaires LR qui y voient le risque d’une coquille vide, Laurent Wauquiez est convaincu du bien-fondé de son idée et voit l’occasion pour le parti de faire des propositions, sujet par sujet. Une façon aussi d’essayer de mettre fin à l’armée mexicaine des secrétaires nationaux de LR…

Au point de dessiner un parti totalement à sa main? C’est ce que certains élus LR redoutent de plus en plus, tant dans la composition que sur la ligne politique… «S’il se recentre, il perd les militants qui l’ont soutenu et à qui il a dit qu’il ne se renierait pas, explique un député LR qui le soutient. S’il ne se recentre pas, il pousse un peu plus les élus LR sur le départ. CQFD .» Un autre parlementaire, qui le connaît depuis très longtemps, imagine une troisième voie: «Il ne peut pas choisir entre ces deux options. Mais Laurent est capable d’adapter sa ligne. Ce n’est pas un idéologue mais un opportuniste. On l’a vu sur l’Europe.» Les ténors de LR attendent donc Wauquiez au tournant, le plaçant «sous surveillance». «Sa ligne n’est pas tactique ni stratégique. Wauquiez, il ne faut pas s’attendre à ce qu’il change de positionnement, défend son entourage. Sa ligne politique est connue. Mais celle du parti sera issue des débats, elle ne les précédera pas. Toutes les sensibilités pourront se faire entendre. Ça ne veut pas dire se renier.»

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Enfin, dès 2018, le président des LR compte renouveler les secrétaires départementaux, véritables préfets du parti, en les nommant pour une durée précise. À chacun, il compte donner une lettre de mission avec une exigence de résultats (évolution du nombre d’adhérents, respect des objectifs pour les élections intermédiaires, etc.). Dans le même temps, il aimerait confier des réflexions thématiques à des élus pour revitaliser le parti. Par exemple, l’ouverture de LR à la société civile, le statut d’adhérent ou encore la création d’un statut de sympathisant – une piste déjà proposée par Bernard Accoyer ou Maël de Calan – pour encourager les Français à participer à la vie du parti sans en prendre la carte.

Alors que nombre de Français se détournent des formations politiques et qu’Emmanuel Macron a émergé sans avoir fait carrière au sein d’un mouvement, Laurent Wauquiez est convaincu que LR peut redevenir un lieu de vie et de bouillonnement intellectuel. Il espère ainsi associer aux grands débats de la droite les intellectuels et les think-tanks qui partagent les valeurs de LR. Comme sur la question de l’Europe, de la science, de la recherche, de l’innovation, etc. «Je veux aussi que nous investissions le thème du développement durable. Je ne veux pas qu’on le laisse à une poignée d’ayatollahs et d’extrémistes de gauche», soutenait-il en meeting, la semaine dernière. «Je veux que nous réfléchissions ensemble à ce monde de demain. Il y a tant de sujets qui nous attendent. Nous devons reconstruire la pensée de la droite, au lieu, à chaque fois, d’aller acheter la pensée de la gauche comme si la philosophie de la droite n’était pas assez riche», détaillait-il.

Et c’est bien le plus gros défi qu’a devant lui Laurent Wauquiez: faire renaître l’enthousiasme sur le terrain pour parvenir à refaire de LR un parti populaire. «Laurent a toutes les capacités pour y parvenir et y parvenir vite. Après, l’avenir n’est pas écrit, glisse Brice Hortefeux. Cela doit être l’histoire de son destin.» C’est ici que tout commence, espère donc Laurent Wauquiez: «C’est un long chemin, et je sais qu’il prendra du temps. Cette élection, c’est une étape.»


 

Source:©  Ce que Laurent Wauquiez prépare pour reconstruire les Républicains

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