Bercy planche sur le cantonnement de la dette Covid

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Le ministère de l’Économie et des Finances, à Paris. Jean-Paul COMPARIN/Jean-Paul Comparin - stock.adobe.com
Le ministère de l’Économie et des Finances, à Paris. Jean-Paul COMPARIN/Jean-Paul Comparin – stock.adobe.com

L’opposition dénonce ce mécanisme, qui permet selon elle d’«augmenter les impôts sans le dire».

Pour amortir l’effet de la crise sanitaire sur l’économie, l’exécutif a sorti les grands moyens. Chômage partiel, annulation de charges, aides aux secteurs en difficulté et aux ménages les plus fragiles, prêts garantis… Le gouvernement a dépensé sans compter ces derniers mois et il va continuer. Le troisième budget rectificatif pour 2020 chiffre à 136 milliards d’euros l’ensemble de ces mesures d’aide. L’État n’a évidemment pas en caisse une telle somme. Les dépenses seront donc financées par un accroissement de l’endettement.

Conséquence immédiate: la dette publique va s’envoler pour atteindre 121 % du produit intérieur brut (PIB) dès cette année. Innovation, les 150 milliards d’euros de dette publique issue de la crise seront formellement isolés dans une structure dédiée, a annoncé en juin Bruno Le Maire. «Cantonner la “dette Covid” en la confinant, c’est l’illustration du vieux réflexe de mettre la poussière sous le tapis… et d’augmenter les impôts sans le dire. Que fera-t-on lors de la prochaine crise?», s’est insurgé Éric Woerth, président (LR) de la commission des finances de l’Assemblée nationale.

Les détails de ce cantonnement ne sont pas encore définis. Le projet de loi de finances pour 2021 pourrait acter un nouvel allongement de la durée de vie de la Cades et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) qui l’alimente ou bien la création d’une nouvelle caisse d’amortissement dédiée à la dette de l’État. Au printemps, les députés avaient déjà voté la prolongation de la Cades, de 2024 à 2033, afin d’y loger les 136 milliards d’euros de dette de la Sécurité sociale issue de la crise sanitaire. L’horizon d’extinction du nouveau véhicule devrait être fixé autour de 2042 afin de «caler le calendrier des remboursements français de dette Covid sur les échéances allemandes», précise-t-on à Bercy.

Financer la dépendance

Au-delà des effets de communication, le cantonnement de la dette Covid doit maintenir la confiance des investisseurs. Année après année, l’État se contente en effet de rembourser les intérêts de sa dette en reportant le remboursement du capital. En cantonnant ces 150 milliards, Paris veut indiquer à ses créanciers que la dette sera bien amortie.

À cette fin, une recette pérenne sera fléchée vers la caisse. Deux pistes de financement tiendraient pour l’instant la corde: un prolongement de la CRDS, ou une fraction de la TVA. Lors de la création de la CRDS, en 1996, cette taxe était définie comme un effort collectif transitoire, pour une durée initiale limitée à treize ans et un mois (soit fin janvier 2009), et affectée à un objet précis: le remboursement de la dette sociale. Les députés l’avaient déjà prolongée de quinze ans par la loi sur l’Assurance-maladie de 2004, avant le dernier allongement, ce printemps, jusqu’en 2033. Si personne ne croyait vraiment à la disparition de cet impôt, son fléchage vers le financement de besoins sociaux nouveaux, par exemple la dépendance des personnes âgées, était attendu. «Ce transfert prive donc la politique sociale de la nation de 10 milliards d’euros de CSG et de CRDS chaque année», dénonce alors le député PS Boris Vallaud.

L’option de financer la caisse d’amortissement de la dette par une fraction de TVA, première recette fiscale de l’État, paraît encore plus incertaine. Sans programme drastique d’économies pour les prochaines années, un tel refléchage aurait pour simple conséquence d’accroître le déficit de l’État et donc in fine sa dette… D’autant que le gouvernement s’apprête déjà à flécher quelques dixièmes des recettes de TVA vers les comptes des régions afin de compenser la baisse des impôts de production.

Source: © Bercy planche sur le cantonnement de la dette Covid

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