
La baisse des marchés financiers traduit une inquiétude accrue sur la croissance. L’activité internationale est suspendue aux négociations commerciales entre Washington et Pékin.
En ce «début 2019, l’opinion générale concernant
l’orientation de l’économie mondiale est assez sombre, tout le contraire
de début 2018». Bruno Cavalier, le chef économiste du groupe financier
Oddo résume bien la situation. Qu’elle semble loin, l’année 2017 et sa
reprise dynamique qui semblait tourner définitivement la page de la
crise mondiale de 2008-2009. À l’orée du nouveau millésime, les nuages
gris s’accumulent à l’horizon.
Les marchés financiers ont donné
un coup de semonce. Ils ont été secoués tout au long du dernier
trimestre. À New York, le Dow Jones a ainsi dévissé de 13 % d’octobre à
décembre, et à Paris, le CAC40 de 16 %. La persistance du bras de fer commercial entre les États-Unis et la Chine,
les tensions entre Donald Trump et le président de la Banque centrale
américaine, Jerome Powell, ou encore la perspective du Brexit ont semé,
sur les marchés, les graines du doute. Au point que vendredi, Jerome
Powell a estimé nécessaire de préciser qu’il ne démissionnerait pas si
«on» le lui demandait, et que la Fed se tenait prête à assouplir son
action, pour rassurer les marchés.
Faut-il craindre une crise comme en 2008 ? – Regarder sur Figaro Live
Trump et Xi ont les clés
Toute
la question est de savoir si les récentes glissades des Bourses
constituent une surréaction à une série d’indicateurs économiques
négatifs, ou si, comme cela s’est déjà produit dans le passé, elles
préfigurent un ralentissement de l’économie réelle, plus marqué que
prévu. Toujours est-il que du FMI à l’OCDE en passant par les grandes
banques, les prévisionnistes, au fil des mois, ont révisé leurs
prévisions à la baisse. La croissance des principaux pays ralentira par
rapport à 2018.
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Surtout, la santé économique de la planète en 2019 semble suspendue aux décisions de deux hommes: Donald Trump et Xi Jinping. Le président américain et son homologue chinois ont conclu une trêve le 1er décembre,
en marge du sommet du G20 à Buenos Aires. Les patrons des deux
premières puissances économiques du monde se sont donné trois mois pour
parvenir à un accord destiné à réduire le déficit commercial des
États-Unis vis-à-vis de la Chine ainsi que les pratiques commerciales
douteuses de Pékin en matière de propriété intellectuelle.
Pour
l’heure, Trump tweete que les négociations se passent bien. Mais un
échec dans les pourparlers entre Washington et Pékin aurait des
conséquences économiques négatives en cascade pour la Chine, les
États-Unis, l’Europe et nombre de pays émergents.
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Dans
cette grande incertitude et ce pessimisme ambiant, des voix se
distinguent toutefois. Mathilde Lemoine de chez Edmond de Rothschild ou
Florence Pisani de Candriam, pensent que la croissance économique des
États-Unis, encore vigoureuse et créatrice d’emplois résistera bien en
2019. D’autres économistes estiment que les entreprises américaines,
privées du dopant des réductions fiscales de l’an dernier, vont accuser
le coup.
«À présent que les marchés entrevoient ce danger, le risque d’une crise financière et d’une récession mondiale a augmenté»Nouriel Roubini, économiste de l’université de New York
Les faiblesses intrinsèques de l’économie chinoise ou le flou qui
pèse sur l’Europe ajoutent des arguments aux prévisionnistes
pessimistes. «La machine à fabriquer de la crise est toujours là»,
avertissait vendredi Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque
centrale européenne, visant davantage l’insuffisance de la régulation
financière.
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Dans
le concert des Cassandre, Nouriel Roubini, l’économiste de l’université
de New York qui s’est fait une réputation internationale en annonçant
la crise de 2008, joue sans modération. Dans une tribune publiée par Project Syndicate,
il compare Donald Trump au «Dr Folamour des marchés financiers. Comme
le fou paranoïaque du film de Stanley Kubrick, il flirte avec la
destruction économique mutuelle assurée». Roubini, très partial,
attribue sans doute un rôle exagéré au seul Donald Trump. Mais il tire
une conclusion, partagée par d’autres économistes: «À présent que les
marchés entrevoient ce danger, le risque d’une crise financière et d’une
récession mondiale a augmenté.»
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Journaliste au Figaro, chef du service Économie internationale
Source :© 2019, une année lourde d’incertitudes pour l’économie mondiale
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